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samedi 9 décembre 2023

DÉCRYPTAGE. Nickel, une richesse qui coûte cher

Àl’heure où l’industrie du nickel en Nouvelle-Calédonie est au bord du gouffre, le secteur, considéré comme stratégique, semble pourtant promis à un avenir doré. Un dossier que Bruno Le Maire, ministre de l’Economie, a eu à cœur de faire avancer lors de sa venue.Jamais, depuis le boom des années soixante, le nickel n’a connu une telle révolution. Comme celle qui promet de transformer les marchés de certains métaux, tels que le lithium, le manganèse, le cobalt et bien sûr le nickel. Avec l’émergence des voitures électriques à travers le monde, le nickel de classe 1 sera un des éléments essentiels dans la construction de leur batterie. Et les besoins devraient être multipliés par dix, voire quarante, selon les scenarii (voir Le nickel : quels enjeux économiques et géopolitiques à l’horizon 2030, par Yves Jégourel). Envol annoncé D’après l’Agence internationale de l’énergie (IEA, 2021), l’utilisation de nickel pour les véhicules électriques pourrait ainsi passer de 81 000 tonnes en 2020 à 986 000 tonnes en 2040, si les ambitions environnementales actuelles sont tenues. Et à 3,3 millions de tonnes si l’on souhaite respecter l’objectif de neutralité carbone d’ici à 2050. En parallèle, les cours du métal vert, selon une projection du Fonds monétaire international, devraient s’envoler, pour se stabiliser autour de 50 000 dollars la tonne à partir de 2035 (lire Une flambée des cours des métaux susceptible de retarder la transition énergétique, par Lukas Boer, Andrea Pescatori, Martin Stuermer et Nico Valckx).
Passer à côté du boom ? Un nouvel eldorado que la Nouvelle-Calédonie, troisième producteur mondial, pourrait bien… rater. Tout au moins dans sa fonction de métallurgiste, celle privilégiée par la stratégie nickel. Une valorisation du minerai censée en principe apporter une plus-value au pays. Or, depuis dix ans, les trois usines que sont celles de la SLN à Nouméa, de KNS à Voh et de Prony resources dans le Grand Sud, présentent des résultats négatifs. Déficits cumulés fin 2022 à 2 216 milliards de francs CFP, soit 218 % du PIB du pays ! Des chiffres émanant de l'IEOM, Institut d'émission d'Outre-mer, dans son rapport économique pour l'année 2022. Les raisons sont multiples. À commencer par la volatilité des prix du nickel au LME, le London metal exchange. En janvier 2016, les cours tombaient à 8 100 dollars la tonne alors qu’il s’est échangé à plus de 26 000 dollars la tonne en moyenne en 2022. Des écarts d’autant plus importants qu’une variation de 1 000 dollars sur le prix de vente peut modifier le résultat annuel de nos entreprises de plusieurs milliards de francs. Et le faire passer en négatif lorsque le "cash cost", le prix de revient en sortie d’usine, flirte avec les tarifs du marché, comme c’est le cas depuis 2017. Bernard Lassauce

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